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Channel: Les Tatane de Vikash - SO FOOT.com
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A bas le mercato !

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Le mercato, on dit. Un truc inventé pour que tout le monde s'en mette plein les poches. Le libéralisme poussé à l'extrême. Une sorte de marché virtuel où l'on s'échange du footballeur à coups de millions. On vend, on achète, on prête, on loue même parfois. Cette arnaque fonctionne plus ou moins sur trois critères : le talent du joueur, son âge et la durée de son contrat. Le football est l'un des rares secteurs où pour débaucher un salarié – fût-il riche et privilégié – il y a un échange d'argent entre deux entreprises. Mais pourquoi payer alors que le joueur ne verra pas un centime de la transaction ?

Certainement parce que le système économique du football fonctionne sur la rupture d'un CDD. Si le joueur a une bonne valeur marchande, on le prolonge ou on le vend avant la fin de son contrat. Le joueur ne souhaite pas prendre de risque – de décote – en allant au bout de son contrat et préfère assurer l'avenir en acceptant le deal. Il devient complice de sa propre exploitation et alimente par là même cette incroyable bulle spéculative.

Il y a un acteur incontournable dans ce grand manège : l'agent. Il est censé travailler pour le joueur, mais il est payé par le club qui se substitue au joueur pour le rémunérer sous forme de commission. Grâce à ce tour de passe-passe, tout ce petit monde échappe à l'impôt. Mais le politique s'en accommode.

L'agent crée l'offre et la demande, et fait flamber le marché avec la complicité de certains patrons de club et de journalistes. Le mien s'appelait Alain Migliaccio, le meilleur évidemment. J'avais décidé de lui faire confiance et de fermer les yeux. J'étais le maillon faible du système, celui qui à la fin aura eu son contrat, son gros salaire juste pour avoir le droit de la fermer, de faire vendre des maillots et des abonnements à Canal+.

Le mercato, c'est le concours de celui qui fera pipi le plus loin dans la cour de récréation. Et à ce petit jeu, en ce moment, c'est Rybolovlev, le patron russe de Monaco, le plus fort. L'autre nouveauté, cette année, c'est que le marché, bien stimulé par la presse, s'affole pour des entraîneurs. Pour l'instant, les Qataris du PSG sont un peu à la traîne. Pas encore de gars au palmarès bien "fat" pour remplacer Ancelotti. Refus de Mourinho, Wenger, Benitez, Hiddink, Laudrup, Capello... mais pas d'inquiétude, au Qatar, la sodomie est interdite : un coach arrivera pour donner confiance au marché et la valse des joueurs pourra commencer.

Je me demande ce qui fait le plus kiffer les nouveaux mécènes du foot français, Nasser et Rybolovlev. Se payer un gars en short moulant ou gagner le championnat ? Pour eux, le mercato, c'est jouer au trader. On mise, on bluffe, on chipe, on perd ou on gagne en coulisse. La vraie adrénaline pour ces rois de la finance.

Le politique doit réagir car le système n'est pas durable. Il faut le réguler. Tatane, avec qui je milite pour un foot durable et joyeux, prépare des propositions visant à supprimer les mouvements d'argent qui accompagnent les transferts de joueurs. Et compte les défendre au niveau européen pour que le footballeur ne soit plus un simple actif dans une entreprise mais redevienne le dieu du stade.

- Par Vikash Dhorasoo

Publié sur lemonde.fr

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